Open Access
Issue
Hydroécol. Appl.
Volume 25, 2025
Article Number 1
Number of page(s) 41
DOI https://doi.org/10.1051/hydro/2025001
Published online 02 April 2025

© EDF, hosted by EDP Sciences, 2025

Licence Creative CommonsThis is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.

1 Introduction

Le fonctionnement par éclusée de certains aménagements hydroélectriques basé sur une production d’énergie renouvelable est indispensable à l’équilibre du réseau électrique. Ce fonctionnement peut induire des modifications importantes du régime de débits. Elles peuvent avoir de fortes incidences sur les écosystèmes aquatiques d’eau courante (Greimel et al., 2018), notamment sur les peuplements piscicoles (Schmutz et al., 2015). Les variations non naturelles de débits peuvent provoquer des exondations de frayères, des échouages-piégeages et des dérives forcées d’alevins (Hunter, 1992 ; Halleraker et al., 1999 et 2003, Baumann et Klaus, 2003 ; Young et al., 2011 ; Casas-Mulet et al., 2014 ; Cornu, 2015 : Bejarano et al., 2017). Ces impacts biologiques directs peuvent notamment affecter la dynamique des populations de truites et réduire les niveaux d’abondance des alevins (Valentin, 1995 ; Liebig et al., 1999). La qualification et l’atténuation de ces impacts doivent s’appuyer sur des méthodologies standardisées de diagnostic puis de dimensionnement des mesures d’atténuation.

Dans le cas de travaux sur des installations hydroélectriques pouvant conduire à de profondes modifications des régimes de débit et notamment la mise en œuvre d’éclusées dans un tronçon à débit réservé, ces approches constituent un outil indispensable à la recherche de mesures d’atténuation. Ces travaux nécessitent une procédure d’autorisation administrative qui rassemble les exigences propres au code de l’énergie et au code de l’environnement. Cette procédure permet d’engager une démarche d’instruction devant aboutir à un arrêté préfectoral encadrant les futurs travaux. Classiquement, ce travail s’organise en deux étapes : une phase d’étude d’incidence conduite par le pétitionnaire et une phase d’instruction des services de l’État. L’étude d’incidence doit qualifier l’état initial, détailler les travaux qui seront réalisés, évaluer leurs impacts sur les habitats et les enjeux de biodiversité du territoire et proposer des mesures d’évitement, de réduction et le cas échéant de compensation de ces impacts (séquence Éviter-Réduire-Compenser consolidée et précisée en août 2016 notamment par la loi de reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages).

Dans la séquence ERC, des approches environnementales novatrices peuvent être mises en œuvre afin de fournir des données et des indicateurs servant d’outils de dialogue dans le cadre d’instances de concertation. C’est le cas notamment de l’évaluation du risque écologique qui constitue une approche plus prospective et propice aux dialogues que l’analyse d’impact ou d’incidence sensu stricto. En effet, l’impact avéré s’appuie sur une quantification a posteriori des modifications des habitats et de la dynamique des espèces en relation avec une altération induite par une pression. Les retours d’expérience permettant cette quantification des effets (à court et long terme) des modifications temporaires de l’hydrologie sont peu nombreux et ne correspondent pas toujours au territoire concerné. L’analyse de risques constitue, elle, une approche prospective. En écologie aquatique, cette démarche est encore peu utilisée. La majorité des analyses de risques portent sur des problématiques d’écotoxicologie (Perrodin et al., 2006 et 2011 : CETMEF, 2001 ; Maltby, 2006). La démarche SYRAH (Système d’Audit Relationnel des Altérations Hydromorphologiques) est l’une des rares approches à avoir été développée dans le domaine de l’hydromorphologie aquatique (Valette et al., 2012). Récemment, une analyse des risques écomorphologiques liés aux éclusées hydroélectriques a été conduite sur l’ensemble du bassin Rhône-Méditerrannée (Baran, 2018).

En s’appuyant sur le croisement d’une vulnérabilité et d’un aléa, l’analyse de risques présente également l’avantage de se rapprocher du vocabulaire de gestion de la sécurité des industriels et constitue ainsi un bon outil de dialogue. Cette démarche conduite en commun entre plusieurs partenaires ne peut pas se réduire à la caractérisation biologique classique d’un cours d’eau, elle nécessite une approche multidimensionnelle (biologique, économique, sociale) permettant de se rapprocher au plus près de la définition, de la nature même du cours d’eau étudié et des services rendus aux populations (Erné-Heintz, 2018).

Dans la vallée du Vicdessos, en Ariège, l’arrêt pendant 2 années de la centrale hydroélectrique de Sabart reprenant les éclusées en provenance des 4 autres centrales présentes en amont, a nécessité la mise en œuvre d’une procédure d’autorisation environnementale. EDF a souhaité, en appui à la séquence réglementaire obligatoire, conduire un travail de concertation et de co-construction avec les acteurs de la gestion des milieux aquatiques.

L’objectif de ce travail est de décrire une méthodologie novatrice d’analyse de risques appliquée à des modifications hydrologiques, de dimensionner des mesures d’atténuation sur la base de modélisations hydrauliques et d’évaluer l’efficacité biologique de ces mesures.

2 Site d’étude et méthodes

2.1 Site d’étude

Le Vicdessos (37 km de longueur, bassin versant de 364 km2) est un affluent de l’Ariège (confluence à 471 m d’altitude). Il prend ses sources dans le massif du Montcalm à plus de 3000 m d’altitude. Cette vallée accueille 5 centrales hydroélectriques exploitées par un seul gestionnaire EDF. Les 4 centrales amont fonctionnent par éclusée et celle située en aval (usine de Sabart) reprend les éclusées en provenance des 4 premières. Cette usine est alimentée par 3 prises d’eau implantées sur le Vicdessos, le Suc et le Siguer (Fig. 1) soit un bassin versant capté de 275 km2. Elle court-circuite 17,5 km de rivière dont 14,8 km pour le Vicdessos avec un bassin versant intermédiaire de 87 km2.

En amont, les usines de Soulcem, Pradières et Bassiès fonctionnent par éclusée. Les eaux de ces 3 aménagements alimentent ensuite directement l’usine d’Auzat située à 830 m en amont de la prise principale de Sabart sur le Vicdessos (prise d’eau de Montréal). Cet aménagement reçoit, via la retenue de Gnioure et l’usine de Pradières, les eaux de 28,9 km2 de bassin versant issu du ruisseau de Siguer qui, naturellement, n’alimenteraient le Vicdessos que 7,8 km plus en aval. Un ensemble de prises fonctionnant au fil de l’eau complète les débits turbinés à Auzat.

thumbnail Fig. 1

Situation géographique du tronçon court-circuité de Sabart avec positionnement de la station hydrométrique, des stations d’étude des zones de frayères et de l’analyse de risques.

Geographical situation of by-pass section of Sabart with positioning gauging station and study sites of spawning habitat and risk analysis.

2.2 Contexte des travaux

EDF a réalisé une importante campagne de travaux de rénovation de la chute de Sabart qui comprend le remplacement des deux conduites forcées et la modernisation de la prise d’eau de l’adduction principale (la prise d’eau de Montréal).

Ces travaux ont nécessité l’arrêt de l’usine pendant 19 mois (septembre 2018 à mars 2020). Durant cette indisponibilité, les 3 prises d’eau l’alimentant ont été effacées. Le régime hydrologique des tronçons court-circuités a donc été constitué des débits naturels des bassins versants intermédiaires amont non dérivés vers les réservoirs et des débits dits d’éclusée provenant des restitutions des usines utilisant les volumes d’eau contenus dans les réservoirs.

Le projet s’est centré sur la définition et le dimensionnement de mesures de réduction des impacts écologiques, adaptées aux enjeux du territoire et aux contraintes économiques de l’exploitation.

3 Méthodes

3.1 Démarche globale

Une démarche globale en 4 étapes successives a été déployée à partir de 2014 avec une évaluation du niveau de sensibilité environnementale et sociétale du territoire, une analyse de risques environnementaux, le dimensionnement des mesures de réduction, leur mise en œuvre opérationnelle et l’évaluation de leur efficacité écologique.

Un Comité de Suivi Environnemental (CSE), instauré en 2017 et regroupant l’ensemble des parties prenantes avait 2 missions principales :

  • suivre la mise en œuvre opérationnelle des mesures environnementales du chantier ;

  • piloter et ajuster les modalités de gestion du tronçon court-circuité (TCC) via les aménagements amont avec l’aide d’un groupe technique ad hoc (GT) composé du service de police de l’eau de la Direction Départementale des Territoires (DDT)), de l’Office Français de la Biodiversité (OFB), de la Fédération Départementale des AAPPMA de l’Ariège (FDAAPPMA 09), du Conservatoire des Espaces Naturels Ariégeois (CEN), de Association "le Chabot" de Protection des Rivières Ariégeoises (APRA), du bureau d’études ECOGEA et des services d’EDF.

3.1.1 Caractérisation de la sensibilité du contexte environnemental et sociétal (étape 1)

Conduite de 2014 à 2018, la caractérisation de la sensibilité du contexte environnemental et sociétal a porté sur l’identification des enjeux d’usages et la description des contextes morphologiques, hydrologiques et biologiques.

3.1.1.1 Caractérisation des enjeux d’usages

Un inventaire des usages a été réalisé sur le tronçon avec une attention toute particulière vis-à-vis de l’usage halieutique de cette rivière. Ce travail a été conduit dans le cadre des échanges avec les gestionnaires du milieu aquatique et notamment le service technique de la FDAAPPMA 09.

3.1.1.2 Description du contexte morphologique

Le contexte morphologique du Vicdessos et de ses affluents a été décrit à deux échelles d’espace :

  • les tronçons morphologiques ont été identifiés par une analyse cartographique reposant sur les critères de pente longitudinale, de largeur du plancher alluvial, de pente des versants et de géologie basée sur la classification de Bravard et Gilvera (1993) (gorges, montagnard, plateau) ;

  • les faciès d’écoulement ont été décrits par un parcours complet des tronçons court-circuités selon les critères de pente, de turbulence de surface et de vitesse d’écoulement conformément à la classification de Delacoste et al. (1995) (Yotte et Garmendia, 2011).

En complément, la description morphologique s’est attachée à identifier des zones particulières vis-à-vis de leur sensibilité à l’ennoiement/dénoiement à savoir des zones de bras secondaires et/ou de bancs alluviaux. Un travail initial à l’échelle du tronçon utilisant des photos aériennes a permis de rapidement identifier les habitats de bancs et de chenaux qui ont ensuite été décrits par une approche de terrain.

Les surfaces granulométriquement favorables (SGF) à la reproduction de la truite ont été mesurées en 2015, à l’étiage (valeur du débit réservé à la prise d’eau), sur 10 stations représentatives du Vicdessos selon la méthodologie de Delacoste et al. (1993) (Fig. 1). Les SGF en eau et celles hors d’eau ont été mesurées.

3.1.1.3 Caractérisation du contexte hydrologique

Les débits moyens journaliers ont été reconstitués pour 2 stations à Vicdessos et Niaux (Tab. 1). Les données utilisées sont issues de 5 stations hydrométriques (Ru d’Artigues à Cibelle (O1115010), Vicdessos à Vicdessos (O1144620), Ariège à Foix (O1252510), Salat à Soueix-Rogalle (O0362510) (©Banque Hydro). La reconstitution a utilisé les surfaces de bassin versant intermédiaire et des débits spécifiques pondérés des stations hydrométriques (Brothier, 2014).

Les débits médians ont été calculés pour différentes périodes du cycle biologique de la truite commune (reproduction, vie sous gravier, émergence, croissance). Ils ont été confrontés à la valeur de débit maximal potentiel des éclusées provenant des usines amont.

Pour l’analyse de l’état initial piscicole, des variables hydrologiques particulières ont été calculées sur la base de l’hydrologie de la station du Salat à Soueix-Rogalle (O0362510) (débit maximal, et Durée Continues d’Habitat Limitant (DCHL)). Ces variables ont été définies par Capra et al. (1995a et 1995b) pour leur influence sur le recrutement en truites. La valeur du débit maximal journalier durant l’incubation des œufs (1er novembre–15 avril), celle des DCHL à l’émergence (15 avril–15 juin) et en période estivale ont été calculées pour chaque année de suivi.

DCHL  émergence  =  ∫ Durées   continues  (jours) Q > Q90; 5 × Q50; Module + 2 écartype Module

DCHL  étiage  =  Durée   continue  maximale   (jours)  avec   Q > VCN305  ou  VCN3050  ou  0,5 × Q50

Une analyse en composante principale a été réalisée sur le tableau des 3 variables et de 12 années de suivi piscicole en étiage estival. Ainsi, les données piscicoles de l’état initial conduit à partir de 2016 ont pu être replacées dans le contexte hydrologique du bassin de l’Ariège.

Tableau 1

Caractéristiques des stations d’étude des débits.

Characteristics of study sites using for study of hydrology.

3.1.1.4 Caractérisation du contexte piscicole

L’objectif était de caractériser la composition du peuplement piscicole, d’identifier les espèces cibles et d’analyser la fonctionnalité des populations. Des inventaires des peuplements piscicoles par pêche électrique ont été réalisés sur deux stations représentatives situées sur le Vicdessos à Arconac et Niaux (Tab. 2, Fig. 2) pendant respectivement 3 et 12 ans selon la méthode des passages successifs (De Lury, 1951).

Les calculs de quantités de poissons par station (densités et biomasses par unités de longueur et de surface) ont été effectués selon la méthode de Carle et Strub (1978). Pour chaque échantillonnage, les poissons ont été mesurés et pesés. Sur la base des histogrammes par classes de taille, les effectifs d’alevins (0+), juvéniles (1+) et adultes (> 1+) de truites ont été comptabilisés.

La fonctionnalité des populations de truites a été analysée sur la base des niveaux d’abondances et de la variabilité inter-annuelle des effectifs de chaque classe d’âge en fonction de l’hydrologie. Deux approches ont été conduites. Pour la chronique de 1995 à 2006 à Arconac, les densités d’alevins ont été corrélées aux débits maximums journaliers observés chaque année pour les périodes de vie sous-gravier et d’émergence des alevins de truites. Pour les données plus récentes de l’état initial (2016 et 2018) sur les deux stations, la densité moyenne d’alevins de truite obtenue chaque année a été discrétisée en 5 classes d’abondance selon le référentiel des Pyrénées centrales (Delacoste et Laribaut, 2002).

En 2015, l’activité de reproduction a été quantifiée sur les 10 stations représentatives sélectionnées dans l’étude de la morphologie (Fig. 1) lors de 5 campagnes successives de comptage. En 2017, 15 campagnes ont été réalisées sur les mêmes stations Le suivi de la reproduction a consisté en une prospection depuis la berge permettant de repérer les structures caractéristiques d’une frayère de truites appelées ici nids (Delacoste, 1995). Chaque nid a été comptabilisé et une cartographie a été réalisée à chaque campagne. Les densités de nids par unité de longueur de chaque station ont été calculées.

Tableau 2

Caractéristiques des stations de suivi piscicole.

Characteristics of study sites of the fish monitoring.

thumbnail Fig. 2

Situation géographique du tronçon court-circuité de Sabart avec positionnement de la station hydrométrique, des stations d’étude de la mobilité du substrat et des poissons.

Geographical situation of by-pass section of Sabart with positioning gauging station and study sites of the mobility of substrate and fish communities.

3.1.2 Analyse des risques environnementaux (étape 2)

Une analyse de risques a été développée en s’appuyant sur la définition d’un contexte biologique dans lequel un croisement des aléas hydrologiques avec la vulnérabilité des habitats est réalisé. La vulnérabilité des habitats correspond aux risques écomorphologiques que sont l’exondation de frayères, l’échouage-piégeage, la dérive forcée des alevins (Baran, 2018). En complément, une étude de la stabilité des substrats des zones de frayères de salmonidés A été conduite afin d’évaluer un risque de destruction des frayères lors des éclusées.

Trois sites d’étude représentatifs de la diversité des formes fluviales ont été sélectionnés pour conduire l’analyse de risques (Tab. 3 et Fig. 1).

La définition du contexte biologique s’est appuyée sur les analyses du contexte piscicole de l’étape 1 en intégrant une approche saisonnière basée sur les phases du cycle biologique de l’espèce cible (reproduction, incubation des œufs, émergence des larves, croissance estivale)

Les risques écomorphologiques ont été évalués pour les 3 problématiques (exondation des frayères, échouage-piégeage et dérive forcée) en croisant les classes d’aléa et de vulnérabilité.

Tableau 3

Sites sélectionnés pour l’analyse des risques écomorphologiques.

Study sites selected for the analysis of ecomorphological risks.

3.1.2.1 Évaluation de l’aléa hydrologique

L’aléa correspond à la quantification de la perturbation hydrologique induite par les éclusées venant des aménagements amont. La méthodologie utilisée est celle de l’indicateur de perturbation hydrologique (Courret et al., 2021) qui permet de qualifier par année et par saison un niveau de perturbation selon 5 classes sur la base de 4 variables (nombre d’éclusée, 1er décile des débits de base, dernier décile des amplitudes et des gradients). Les calculs ont été réalisés sur des données de débits horaires turbinés à l’usine d’Auzat (©EDF) auxquels a été ajoutée la valeur du 1er décile des débits observés à la station hydrométrique de Vicdessos soit 1,1 m3/s. Les calculs ont été réalisés sur la période 2005–2015.

L’aléa a été obtenu en discrétisant les valeurs de l’indicateur de perturbation hydrologique issu de la méthodologie de Courret et al. (ibidem) en 3 classes (Baran et Ville, 2018) selon la valeur de l’indicateur hydrologique : faible [1–2], Moyen [3], Fort [4–5].

3.1.2.2 Évaluation de la vulnérabilité

Les vulnérabilités à l’exondation des frayères, à l’échouage-piégeage et à la dérive forcée ont été quantifiées sur la base des caractéristiques de la morphologie décrites à l’étape 1. Chaque vulnérabilité a été discriminée en 3 classes (faible, moyenne et forte) (Baran et Ville, 2018) (Tab. 4).

La vulnérabilité à l’exondation des frayères correspond aux surfaces granulométriquement favorables ennoyées et dénoyées lors des éclusées. La vulnérabilité à l’échouage-piégeage est évaluée sur la base des surfaces de bancs alluviaux et chenaux secondaires ennoyées et dénoyées lors des éclusées (Indice Global d’Habitat Sensible (IGHS)).

La vulnérabilité à la dérive forcée correspond à la puissance spécifique des tronçons de cours d’eau pour une valeur de débit correspondant au dernier décile des débits maximaux d’éclusée.

Tableau 4

Limites des classes de vulnérabilité écomorphologiques (SGF : surface granulométriquement favorable à la reproduction ; IGHS : Indice Global d’Habitat Sensible).

Limits of ecomorphological vulnerability classes.

3.1.2.3 Évaluation du risque

Le niveau de risque a été déterminé selon la grille développée par Baran et Ville (2018) (Tab. 5).

Tableau 5

Tableau de contingence pour l’évaluation du niveau de risque écomorphologique.

Contingency table for the assessment of the level of ecomorphological environmental hazard.

3.1.3 Dimensionnement des mesures d’atténuation des impacts (étape 3)

Cette étape s’est appuyée sur des études hydrauliques spécifiques, des suivis in situ de mobilité de substrats et la construction collective des mesures respectant les phases du calendrier biologique de la truite.

3.1.3.1 Études hydrauliques

La modélisation hydraulique a été réalisée pour une gamme de débit de 1 à 16 m3/s. à partir de données topographiques recueillies sur les 3 sites d’étude représentatifs sélectionnés pour l’analyse de risques (Tab. 3). Le modèle hydraulique TELEMAC 2D (Telemac site Web : http://www.telemacsystem.com) a été utilisé avec le modèle de turbulence k – ε et une rugosité spatialisée (ECOGEA, 2017).

Les évolutions des surfaces granulométriquement favorables à la reproduction (SGF), de la qualité des habitats de reproduction (SGFSPU) selon la méthodologie de Delacoste et al. (2000) et des surfaces d’habitat favorables aux alevins post-émergents ont été quantifiées. Pour ce stade, les critères de préférenda de Liebig et al. (1999) ont été utilisés (0–0,1 m/s : vitesse optimale ; 0,1–0,2 m/s : vitesse suboptimale ; > 0,2 m/s : vitesse défavorable) sans critère pour la hauteur d’eau. Une cartographie des courbes d’iso-vitesse 10 et 20 cm/s a été réalisée à chaque débit. L’analyse d’un maintien de connectivité entre ces courbes lors d’une augmentation du débit a été conduite.

Des calculs directs de la mobilité du substrat des zones de frayères (diamètre médian de 2,5 cm) ont été réalisés utilisant la force tractrice (τ) avec un critère de Shields de mise en mouvement fixé à θc = 0,047.

Le module complémentaire Sisyphe de TELEMAC 2D permettant le calcul de transport solide en situation instationnaire a été utilisé sur la base des formules de Meyer-Peter Müller (1948) et d’Einstein-Brown (1950).

3.1.3.2 Études in situ de la mobilité des substrats des zones de frayères de truites

Une étude in situ de la mobilité de substrats marqués représentatifs des diamètres de la granulométrie des zones de frayères a été conduite en 2017 et 2018. L’objectif étant d’établir un débit maximal pour les éclusées en dessous duquel les substrats des zones de frayères n’étaient pas mobilisés.

Les tests ont été réalisés sur les 4 sites d’étude issus de l’analyse de sensibilité des frayères (Fig. 2).

Les substrats de type petit galet prélevés dans les zones de frayères potentielles ont été marqués par implantation d’un PIT-TAG passif de 23 mm (Texas instruments – TRPGR30ATGA). Chaque galet a été mesuré (axe b). Le PIT-TAG a été inséré dans une entaille rebouchée en utilisant de la colle époxy (Araldite). Ils ont ensuite été peints afin de pouvoir les repérer plus facilement.

Au total, 380 galets marqués ont été implantés (longueur médiane axe b = 37 mm, D84 = 42 mm) dans des zones granulométriquement favorables soit directement en surface soit sur une zone dans laquelle a été recréée la structure creux/dôme.

L’ensemble des galets marqués ont été géoréférencés à l’aide d’un GPS de précision (Géo X7 – Trimble).

Après chaque test de lâcher de débit, une recherche des particules a été engagée au niveau des zones de dépôts à l’aide d’une antenne (BF-D500 – CIPAM) et leur positionnement a été à nouveau renseigné.

Des lâchers de débits à partir des usines hydroélectriques amont ont été réalisés en octobre 2017 et juin 2018. Deux valeurs maximales ont été testées correspondant à des débits de 12,5 et 18 m3/s à la station hydrométrique de Vicdessos.

3.1.4 Mise en œuvre des mesures d’atténuation (étape 4)

3.1.4.1 Co-construction des mesures d’atténuation

Des mesures d’atténuation ont été définies par le groupe technique en se basant sur des objectifs partagés et l’utilisation d’indicateurs. Ces objectifs concernaient la sécurité des personnes, évoluant dans le lit du cours d’eau, la limitation des impacts sur le recrutement de la truite et la faisabilité technique des mesures de gestion des débits et leur coût. Ce travail amont permettait au gestionnaire des usines hydroélectriques un bon niveau d’anticipation des contraintes permettant un réaménagement de la gestion de la production.

3.1.4.2 Modalités de mise en œuvre des mesures d’atténuation

La mise en œuvre des mesures d’atténuation s’est appuyée sur une instrumentation de la rivière (3 stations de mesures en continu et télétransmission des hauteurs d’eau et des températures), des suivis biologiques, des échanges au sein d’une instance de gouvernance et un pilotage des aménagements hydroélectriques. Pour permettre d’adapter la gestion des usines, les programmes de production ont intégré les contraintes induites par les mesures d’atténuation.

Les suivis biologiques ont concerné l’activité de reproduction. Le même protocole que celui mis en œuvre lors de l’analyse de sensibilité a été repris. Sept stations ont été suivies dont une témoin en amont du tronçon court-circuité. Des campagnes de comptages bihebdomadaires ont été réalisées du 1er novembre au 20 décembre au cours des automnes 2018 et 2019. Ces observations ont été réalisées par la FDAAPPMA 09 appuyée ponctuellement par ECOGEA.

Pour évaluer l’efficacité complète des mesures d’atténuation, une caractérisation de l’état des peuplements piscicoles a été réalisée en 2019 et 2020. La même méthodologie que celle utilisée dans l’étape 1 (inventaires des peuplements piscicoles par pêche électrique) a été appliquée sur les deux stations représentatives situées à Arconac et Niaux (Tab. 2). Les échantillonnages ont été effectués par la FDAAPPMA et ECOGEA. Les données ont été traitées de la même manière afin de pouvoir comparer la situation avant les travaux avec celle observée pendant et après les travaux.

Les décisions de mise en œuvre des mesures d’atténuation ont été prises au sein du groupe technique ad hoc. L’édition hebdomadaire de bulletins d’informations issus des suivis biologiques et la mise en place d’un dispositif de vigilance ont permis d’anticiper la prise de décision pour l’exploitant. Ainsi la déclaration d’un statut de vigilance renforcée signifiait pour l’exploitant la mise en œuvre des mesures d’atténuation dans les 7 jours suivants.

4 Résultats

4.1 Sensibilité du contexte environnemental et sociétal

Les premières rencontres avec les acteurs locaux ont rapidement mis en lumière, sur la base de l’expertise de la FDAAPPMA 09, les forts enjeux associés à la très bonne qualité biologique du Vicdessos.

Les usages de la ressource en eau dans le tronçon court-circuité du Vicdessos étaient assez limités avec deux dérivations agricole et industrielle de faible débit (< 0,2 m3/s) et une dérivation hydroélectrique sur les 2,5 derniers km du tronçon court-circuité.

Les usages récréatifs d’eau vive et de baignade n’étaient pas présents. En revanche, l’usage halieutique était très prégnant. En effet, le Vicdessos, et tout particulièrement le tronçon d’étude, était défini par la FDAAPPMA de l’Ariège comme un haut lieu de la pêche de loisir dans le massif pyrénéen (forte fréquentation, organisation de compétitions prestigieuses (Championnat de France de Pêche à la mouche) générant des retours pour l’économie touristique locale.

4.1.1 Le contexte morphologique

Les tronçons morphologiques dominant le Vicdessos, le Suc et le Siguer sont de type montagnard pour 72 % du linéaire. Les tronçons de gorges n’occupent que 13 % du linéaire et les plateaux 15 %. La composition en faciès d’écoulement est dominée par la succession d’escaliers, de plats et de profonds. Le style fluvial est de type chenal unique sur 97 % du linéaire. Sur les 14,8 km de tronçon court-circuité, les chenaux secondaires n’occupent que 480 m de linéaire et les bancs alluviaux 285 m.

En 2015–2016, les surfaces granulométriquement favorables (SGF) à la reproduction occupaient 7,5 % de la surface mouillée d’étiage (de 1,2 à 65 % selon les stations). Deux sites particuliers se distinguaient, le Pont d’Illier avec des surfaces occupant 21 % du lit et un canal à Niaux avec 65 % de surface favorable. Sur les autres sites, les plages de graviers-petits galets se répartissaient sur la totalité du lit mineur (Tab. 6). En étiage, les surfaces favorables hors d’eau ne représentaient, en moyenne, que 7,8 % de la SGF totale avec un maximum dans la station d’Arconac qui présentait une morphologie particulière avec présence de bancs et chenaux (19,5 % de SGF hors d’eau).

Cette 1ère approche morphologique a permis de surtout identifier des enjeux vis-à-vis de l’ennoiement des zones de frayères et de conservation des habitats de reproduction au cours des variations de débit.

Tableau 6

Surface granulométriquement favorable à la reproduction aux 10 stations d’étude de l’habitat et de l’activité de reproduction au cours de l’étape 1.

Area of gravel suitable for spawning of the 10 study sites of spawning habitat and activity for the step 1.

4.1.2 Le contexte hydrologique initial

Le régime hydrologique naturel du Vicdessos est de type nival (Fig. 3). Le module naturel à l’amont de la prise d’eau de Montréal est de 6,9 m3/s et le QMNA2 de 2,1 m3/s. Hors période de travaux et en fonctionnement normal de l’aménagement de Sabart, le régime hydrologique du tronçon court-circuité présente un module de 3,4 m3/s et un QMNA2 de 1,4 m3/s.

L’analyse prospective conduite dans cette étape a montré qu’un régime hydrologique de base allait s’installer dans le tronçon court-circuité grâce aux débits provenant des 135 et 240 km2 de bassin versant de fil de l’eau à Vicdessos et Niaux. Le débit médian serait multiplié par deux par rapport à la situation actuelle (de 1,77 à 3,44 m3/s) et les étiages moyens mensuels augmenteraient de 40 % (de 2 m3/s à 2,8 m3/s) (Fig. 4).

Les débits maximaux d’éclusées provenant des usines amont pouvaient s’élever respectivement à 5,6, 5,7 et 4,6 fois les débits médians de la rivière à Vicdessos pour les périodes de reproduction, de vie sous-gravier et de croissance estivale de la truite. Ces valeurs passaient à 3, 2,9 et 2,7 fois les débits médians à Niaux.

Cette première analyse montrait clairement que le transfert d’éclusées dans ce tronçon pouvait induire des modifications hydrologiques importantes. À l’issue de cette étape, il a été décidé de quantifier les niveaux de perturbations dans le cadre de l’analyse de risques de l’étape 2.

thumbnail Fig. 3

Débits moyens mensuels naturels et observés du Vicdessos à la station hydrométrique de la banque HYDRO (station o1144620). 

Natural and observed mean monthly flows of Vicdessos at the gauging station in the by-pass section at Vicdessos (station o1144620).

thumbnail Fig. 4

Comparaison des débits médians de l’hydrologie de base aux différentes périodes du cycle biologique de la truite avec le débit maximal potentiel des éclusées à la station hydrométrique de Vicdessos et à Niaux.

Comparison between median flows of the basic hydrology for the different life-stage of brown trout with the maximum potential flow of hydropeaking at the gauging station of Vicdessos and Niaux station.

4.1.3 Le contexte piscicole initial

4.1.3.1 Structure et abondance du peuplement piscicole

Quatre espèces de poissons ont été inventoriées dans le tronçon court-circuité. La truite commune est l’espèce dominante (plus de 93 % du nombre de poissons capturés, Tab. 7).

Pour la période 1995–2006 à Niaux, les abondances numériques et pondérales de truites ont été qualifiées de fortes (3907 ind./ha pour 180 kg/ha ; 625 ind./100 m pour 28,8 kg/100 m) et moyennement variables (coefficient de variation des densités de 40 %). Ces résultats ont été confirmés par les échantillonnages de 2016 et 2018 avec des densités de truites de 7789 et 3315 ind./ha (1246 et 530 ind./100 m) (Tab. 8). À Arconac, pour les deux mêmes années, les abondances ont été qualifiées de moyennes (1564 et 2120 ind./ha).

De 1995 à 2016, à Niaux, les densités d’alevins étaient très variables (coefficient de variation de 70 % entre 1995 et 2006). En 2016 et 2016, les effectifs de cette classe d’âge représentaient, en moyenne, 32,6 % des poissons capturés à Niaux et 21,5 % à Arconac. À Niaux, pour la chronique 1995–2006, les densités d’alevins étaient significativement corrélées à la moyenne des débits maximaux journaliers observés aux 3 stations hydrométriques les plus proches et ce durant les périodes d’incubation et/ou d’émergence (r2 = 0,47 ; p < 0,05) (Fig. 5). Les densités de juvéniles (1+) étaient significativement corrélées à celles des alevins observés une année auparavant (r2 = 0,77, p < 0,05) et celles des adultes aux densités de juvéniles de l’année précédente (r2 = 0,58, p < 0,05).

Les campagnes complémentaires de 2016 et 2018 ont confirmé le fonctionnement de la population de truites. Le recrutement de l’année 2016 a été qualifié de bon sur le haut bassin de l’Ariège et d’excellent sur le Vicdessos (4209 ind./ha) alors que celui de 2018 a été considéré comme mauvais pour les deux contextes (180 ind./ha sur le Vicdessos ; classe d’abondance mauvaise).

Les contextes hydrologiques de ces 2 années ont été très différents. Les débits d’incubation et de post-émergence ont été très forts en 2018 à la fois sur l’ensemble du haut bassin de l’Ariège et sur le Vicdessos (70 m3/s en janvier) alors qu’à l’opposé, l’année 2016 a présenté une hydrologie nettement moins soutenue pendant l’incubation des œufs et l’émergence des alevins (Fig. 6).

Tableau 7

Occurrence des différentes espèces de poissons capturés aux deux stations d’étude.

Occurrence of the different fish species caught at the two study sites.

Tableau 8

Densité numérique et pondérale des différentes espèces de poissons capturés aux deux stations d’étude.

Numerical and weight density of the different fish species caught at the two study sites.

thumbnail Fig. 5

Relation entre la densité d’alevins à la station de Niaux entre 1995 et 2006 et le débit maximal journalier des 3 stations hydrométriques les plus proches pendant la période d’incubation et d’émergence.

Relationship between the density of trout fry and the daily maximum flow of the 3 near gauging stations during the incubation of eggs and the emergence of fry.

thumbnail Fig. 6

Analyse en composante principale des variables hydrologiques des stations hydrométriques du haut bassin de l’Ariège influençant les phases du cycle biologique de la truite. Les deux 1ers axes expliquent 95 % de la variance.

Principal composant analysis of hydrological variables of the gauging stations of high Ariège basin influencing the phases of the biological cycle of trout. The first two axe accounted for 95% of variance.

4.1.3.2 Activité de reproduction

En automne 2015 et 2017, respectivement 336 et 264 nids ont été comptabilisées sur les 10 stations d’étude soit une densité 29 et 21 nids sur 100 m (Tab. 9). L’activité de reproduction a lieu sur tous les sites mais avec des secteurs à plus forte activité comme la station d’Arconac, du Pont d’Illier, les canaux rive gauche et droite ainsi que le pont de Niaux. En 2017, la chronologie des pontes a présenté une forte augmentation de l’activité après la hausse des débits du 15 novembre (Fig. 7). Le 22 novembre, 68 % des nids ont été comptabilisées et 95 % le 05 décembre. Ces observations ont permis de caractériser précisément la période de reproduction et donc la chronologie des éventuelles mesures d’atténuation. Ces données issues d’observations de terrain ont été primordiales car elles ont constitué le socle des prospectives biologiques (e.g. dates d’émergences des alevins) une fois adossées les données de températures moyennes journalières du cours d’eau.

Tableau 9

Densités de frayères aux 10 stations d’étude de l’activité de reproduction lors de l’état initial de 2015.

Redd densities at the 10 study sites of spawning activity during the initial state at 2015.

thumbnail Fig. 7

Évolution du nombre cumulé de frayères comptabilisée sur les 10 stations d’étude en 2017 et des débits moyens journaliers à la station hydrométrique de Vicdessos.

Evolution of the cumulative number of redds recorded at the 10 study sites in 2017 and the average daily flows at the Vicdessos gauging station.

4.2 Les risques environnementaux

La truite commune a constitué l’espèce cible de l’analyse de risques en s’appuyant sur les différentes phases de son cycle biologique. Quelle que soit l’année et la période biologique, la perturbation hydrologique induite par les éclusées de l’usine d’Auzat a été classée de niveau 5 (très sévère) soit un aléa hydrologique fort. Le 1er décile des débits de base s’établissait à 16 % du module et les derniers déciles des amplitudes et des gradients (147 % du module et 38 % du module/h)

Les vulnérabilités (Tab. 10) ont été qualifiées de :

  • moyennes sur 84 % du linéaire et faibles sur 16 % pour l’exondation des frayères ;

  • de faibles sur 84 % du linéaire et fortes sur 16 % pour l’échouage-piégeage ;

  • de fortes sur la totalité du linéaire pour la dérive forcée ;

  • de moyennes sur 84 % du linéaires et fortes sur 16 % pour la stabilité des substrats des frayères.

Pour 84 % du linéaire du tronçon court-circuité du Vicdessos, les risques d’exondation de frayères ont été évalués comme forts. Les risques de dérive forcée et d’instabilité des substrats ont été qualifiés de forts sur 100 % du linéaire tandis que l’échouage-piégeage a été quantifié comme fort sur uniquement 16 % du linéaire (Tab. 11).

Les échanges au sein du groupe technique ad hoc sur les résultats de l’analyse de risques ont conduit à orienter les études de validation des risques et de dimensionnement des mesures d’atténuation sur les exondations de frayères, la dérive forcée des alevins et la stabilité des substrats.

Tableau 10

Résultats de l’analyse des vulnérabilités.

Results of vulnerability analysis.

Tableau 11

Résultats de l’analyse des risques.

Results of risk analysis.

4.3 Sensibilité des habitats au débit

La mise en eau des frayères était très significative entre 7 et 10 m3/s (Fig. 8). Au-delà, peu de nouvelles surfaces étaient ennoyées. La qualité d’habitat qui intègre les conditions hydrauliques sur les zones favorables diminuaient nettement à partir de 10 m3/s.

Les surfaces d’habitats optimales et sub-optimales pour alevins de truites post-émergents diminuaient respectivement de 27 et 35 % entre 1,5 et 5 m3/s puis à nouveau de 28 et 27 % entre 10 et 16 m3/s (Fig. 9). Au débit maximal d’éclusée (16 m3/s), les surfaces d’habitat optimal pour les alevins ne représentaient plus que 7 % de la surface mouillée.

L’analyse des courbes d’iso-vitesses 10 et 20 cm/s a montré qu’elles étaient très fortement déconnectées lors d’un passage direct entre 5,7 m3/s (débit médian de la période de post-émergence) et 16 m3/s. Un palier de débit de 4–5 m3/s permettait une connexion hydraulique entre les deux situations et assurait ainsi aux alevins une possibilité de changement d’habitats limitant les risques de dérive forcée.

thumbnail Fig. 8

Relation entre les surfaces granulométriquement favorable à la reproduction mises en eau (SGF), les surfaces hydrauliquement favorables (SGFSPU) et le débit aux 3 stations étudiées dans l’analyse de risque.

Relationship between area of gravel suitable for spawning (SGF) and weighted usable area (SGFSPU) and value of flow at the 3 study sites of risk analysis.

thumbnail Fig. 9

Relation entre les surfaces d’habitat favorable aux alevins post-émergents de truite et le débit aux 3 stations étudiées dans l’analyse de risque.

Relationship between weighted usable area for post-emergent trout fry and value of flow at the 3 study sites of risk analysis.

4.4 Mobilité des substrats des zones de frayères

Par un calcul direct des forces tractrices, la plupart des zones de frayères favorables étaient mises en mouvement pour des débits de l’ordre de 16 m3/s. Les 2 modèles utilisés dans Sisyphe donnaient eux des résultats contradictoires : Meyer-Peter, comme lors du calcul direct annonçait une mise en mouvement, Einstein-Brown prévoyait la stabilité du fond.

Sur 379 galets détectés à l’issue des 2 tests (sur un total de 380 implantés), 56 avaient bougé (14,7 %). Les fractions mobiles étaient très peu différentes entre les 2 tests (16 % au 1er test et 13 % au second) ainsi qu’en fonction de la position initiale du galet (en surface ou dans une structure creux/dôme).

La mobilité la plus forte a été observée à la station amont d’Arconac avec 24 % de galets mobiles et la plus faible à la station S2 de Camplong (2 % de galets mobiles). Au Pont d’Illier et à Niaux, les mobilités étaient respectivement de 10 et 11 %.

La distance cumulée médiane de déplacement était de 4,4 m (50 % entre 2,4 m et 13,6 m). Quatre-vingt pour cent des galets s’étaient déplacés entre 1,3 et 32 m et 3 galets ont fait plus de 32 m (distance maximale : 42 m).

La présentation de ces résultats au groupe technique a permis de conclure que, dans la gamme de débits testés, les risques de destruction complète des frayères par entraînement des substrats étaient faibles.

4.5 Les mesures d’atténuation et leur pilotage

Cinq mesures différentes portant sur la gestion des débits issus des aménagements hydroélectriques de la chaîne amont ont été mises en œuvre pour les différentes phases du cycle biologique de la truite (Tab. 12).

Tableau 12

Mesures d’atténuation mise en œuvre par phase du cycle biologique de la truite.

Mitigation measures implemented during the different life-stages of trout.

4.5.1 Mise en œuvre de l’arrêt de 3 semaines des installations pendant la période de reproduction

Pour l’arrêt de 3 semaines pendant la période de reproduction, la prise de décision s’est appuyée sur le suivi de l’activité de reproduction dans le tronçon court-circuité, la température de l’eau et les prévisions météorologiques. En effet, les connaissances sur la reproduction des salmonidés indiquent une accélération de l’activité lorsque la température diminue nettement sous un seuil de 5–8 °C (King et Pankhurst, 2000). Le principe visait à déclarer tout d’abord un niveau de vigilance sitôt que l’activité de reproduction avait débuté sur tous les sites, puis un niveau de vigilance renforcée lorsque le nombre de nids commençait à nettement augmenter et que les prévisions météorologiques annonçaient un net refroidissement. À partir de la déclaration de ce niveau, la décision de l’arrêt était prise dans le groupe technique pour une mise en œuvre 6 à 8 jours plus tard.

4.5.2 Mise en œuvre de la réduction du nombre d’éclusée en période d’émergence des alevins

La mise en œuvre de cette mesure s’est appuyée sur la dynamique de l’émergence des alevins qui dépend de la température de l’eau depuis la date de ponte des œufs et de la dynamique de l’activité de reproduction (Tab. 13 et Fig. 10). Les différents niveaux de vigilance ont été déclarés afin d’aboutir à la date de modification du régime d’éclusée. La déclaration du niveau de vigilance renforcée signifiait une modification de la gestion dans les 2 à 3 semaines à venir. La décision de modification était prise par le groupe technique ad hoc 7–8 jours avant la date effective.

Tableau 13

Critères de déclaration des états de vigilance basés sur le nombre cumulé de degrés-jours nécessaires pour l’émergence des larves chez la truite commune (Baglinière et Maisse, 2002 : Elliot, 1994 : Bruslé et Quignard, 2001).

Criteria for declaring states of vigilance based on the cumulative number of degree-days required for larvae to emerge in brown trout (Baglinière and Maisse, 2002 : Elliot, 1994 : Bruslé and Quignard, 2001).

thumbnail Fig. 10

Évolution des degrés-jours depuis le début de la ponte et le 1er quartile de l’activité de reproduction avec projection des différents niveaux de vigilance.

Evolution of degree-days since the first laying and 1st quartile of spawning activity with projection of the different levels of vigilance.

4.5.3 Pilotage des aménagements hydroélectriques

Pour permettre d’adapter la gestion des usines aux exigences des mesures d’atténuation, les programmes de production ont intégré les contraintes de débit maximal autorisé (fonction des périodes). Pour respecter au mieux ces contraintes, EDF a implanté un dispositif d’arrêt de la production d’une ou plusieurs machines des usines en cas de dépassement du seuil de débit maximal mesuré en rivière. Cela a demandé un important travail de modification des automates des groupes de production des aménagements amont. Le suivi quotidien de l’exploitation de la veille a confirmé le bon fonctionnement du système de limitation des débits selon les périodes.

4.6 Suivi de l’efficacité des mesures d’atténuation

4.6.1 Contexte hydrologique pendant les travaux

L’hydrologie du tronçon court-circuité a été significativement différente durant la période de travaux comparativement à la situation avant travaux (Tab. 14 et Fig. 11). Les débits moyens annuels et les débits médians ont augmenté respectivement de 123 et 240 % pendant les travaux. Les étiages moyens mensuels ont été supérieurs de 220 % à ceux de la période avant travaux et la valeur des derniers déciles des débits classés de 72 %. De septembre 2018 à septembre 2019, un seul débit journalier fort de 32 m3/s (soit 4 fois le module) a été observé. En revanche, une crue de 73 m3/s de débit maximal journalier (crue de fréquence vicennale) est intervenue en décembre 2019, valeur identique à la crue de janvier 2018.

Durant les 19 mois de travaux, le régime hydrologique du tronçon court-circuité a été modifié par les éclusées provenant des usines amont. Au total, 928 variations non naturelles de débit ont été détectées. Le niveau de perturbation hydrologique a été classé sévère (classes 4− et 4+ de l’indicateur) (Tab. 15). Dans l’analyse de risques, la perturbation potentielle avait été évaluée à un niveau très sévère (classe 5 de l’indicateur).

Tableau 14

Comparaisons des caractéristiques du régime hydrologique avant et pendant les travaux.

Comparison of the characteristics of flow regime before and during the work period.

thumbnail Fig. 11

Comparaison des débits moyens journaliers pendant la période de travaux avec les débits médians, quinquennaux secs et humides du tronçon court-circuité.

Comparison of mean daily flow during the work period and the median, five-year dry and wet flow of the by-section section.

Tableau 15

Nombre d’éclusées et valeur de l’indicateur durant les différentes périodes de travaux.

Number of hydropeaking and value of indicator during the different period of works.

4.6.2 L’activité de reproduction pendant les travaux

Les premières activités de reproduction ont été observées début novembre que ce soit en 2018 ou en 2019. L’arrêt de 3 semaines des aménagements hydroélectriques amont a démarré le 20/11/2018 et le 18/11/2019.

En 2018 et 2019, 445 et 341 nids de truites ont été comptabilisés sur les 705 m de linéaire des 6 stations d’étude du tronçon court-circuité de Sabart contre 42 nids et 39 pour les 95 m de la station témoin. La majorité de l’activité de reproduction de 2018 et 2019 a pu avoir lieu pendant les 3 semaines d’arrêt des usines amont (respectivement 75 et 83 %) (Tab. 16 et Fig. 12).

Les densités de nids ont été supérieures pendant la période de travaux (49 et 54 nids/100 m en 2018 et 2019) à celles observées lors de l’état initial en 2015 et 2018 (42 et 33 nids/100 m).

L’arrêt des turbinages pendant 3 semaines a permis de garantir un niveau élevé d’activité de reproduction. Aucune frayère exondée n’a été observée.

Les campagnes d’observations conduites immédiatement après la crue du 14/12/2019 ont permis de constater que de nombreux nids étaient totalement détruits avec la disparition des plages de graviers. Toutefois, une activité de ponte a repris en décembre après cet évènement.

Tableau 16

Nombre de nids de truites comptabilisés sur le Vicdessos pendant et en dehors des périodes d’arrêt des turbinages des usines amont travaux.

Number of redds of trout counted during and outside the shutdowns of the upstream hydropower plants.

thumbnail Fig. 12

Évolution du nombre de nids cumulés sur les 6 stations d’étude du TCC de Sabart et du débit à pas de temps variable à la station hydrométrique de Vicdessos.

Evolution of the cumulative number of redds in the 6 study sites of the by-pass section of the Vicdessos and Variable and short time-step flow at the Vicdessos gauging station.

4.6.3 Émergence des alevins de truites

Les régimes thermiques ont été très différents entre les deux années de travaux. L’hiver 2020 a été significativement plus chaud que celui de 2019 (5,6 °C en moyenne contre 4,7 °C (p > 0,05)). Sur la base de ces données thermiques, le calcul des dates probables d’émergence a fourni des valeurs très différentes avec une émergence potentielle d’1/4 des pontes le 11 mars en 2020 contre le 29 mars en 2019. De même, la fin de cette phase a eu lieu le 23 avril en 2020 et le 10 mai en 2019. La réduction du nombre d’éclusées (29 en 2019 et 0 en 2020) a donc été mise en œuvre beaucoup plus tôt en 2020 mais avec une durée totale presque identique (36 jours en 2020 et 37 jours en 2019).

4.6.4 L’état de la population de truites pendant et après les travaux

Le contexte hydrologique des 2 années de suivi a été caractérisé par des débits printaniers moyens en 2019 et faibles en 2020 avec une crue en décembre 2019 (voir Fig. 11). Le contexte hydrologique naturel a donc été favorable à un très bon niveau de recrutement en 2019. En 2020, les conditions printanières ont été favorables à un très bon niveau de recrutement mais la crue de décembre a partiellement détruit les frayères Les données piscicoles du réseau de suivi de 21 stations par la FDAAPPMA 09 ont confirmé cette situation avec un niveau de recrutement jugé excellent en 2019 et bon en 2020 (Fig. 13).

Deux espèces de poissons ont été capturées aux 2 stations, le chabot et la truite commune. Les densités de chabots ont été significativement plus élevées à la station d’Arconac en 2019 et 2020 qu’en 2016 et 2018 avant les travaux (19,4 ind./100 m contre 1,5 ind./100 m (p < 0,05)). À Niaux, les densités ont été identiques entre les deux périodes (2,4 ind./100 m et 0,5 ind./100 m).

À Arconac, les densités totales de truites ont été significativement plus fortes (p < 0,05) pour la période de travaux qu’avant. La situation est inversée à Niaux avec des densités plus fortes (p < 0,05) avant les travaux.

Pour les deux années et les deux stations, les densités d’alevins ont été qualifiées d’excellentes (Fig. 14). En 2019, avec un contexte hydrologique favorable, les densités d’alevins à Arconac sont fortes et supérieures à celles de 2016. En 2020, malgré la crue de décembre et la destruction d’une partie des frayères, le niveau du recrutement reste bon (Fig. 14). À Niaux, la densité d’alevins capturés en 2019 est forte mais inférieure de 48 % à celle de 2016. En 2020, comme à Arconac et malgré la crue de décembre, le recrutement est fort.

La mise en place des mesures d’atténuation a donc permis, surtout en 2019, dans un contexte hydrologique naturel favorable au recrutement, de garantir le maintien de fortes densités d’alevins sur le tronçon court-circuité du Vicdessos même si les valeurs n’atteignent, à Niaux, que 48 % du potentiel du secteur et 68 % pour la totalité du tronçon court-circuité. Cet enjeu s’est révélé d’autant plus fort que le recrutement a été affecté par les forts débits de crue surtout en 2018 et partiellement en 2020.

Ces densités d’alevins élevées se sont traduites par des abondances fortes de truites d’1 an en 2020 particulièrement à Arconac indiquant le maintien du fonctionnement de la population de truites sur le tronçon.

thumbnail Fig. 13

Classes d’abondance annuelle des alevins de truite calculées sur 20 stations du haut bassin de l’Ariège (a) et sur les 2 stations d’étude du Vicdessos (b) de 2016 à 2020.

Annual abundance class of trout fry calculated for 20 sites of the high Ariège basin (a) and the 2 study sites of Vicdessos (b) from 2016 to 2020.

thumbnail Fig. 14

Densités des différentes classes d’âge de truites pour les 4 années de suivi sur la station de Niaux (SP2) (a) et d’Arconac (SP1) (b).

Densities of different age-class of trout for the 4 years of monitoring at the Niaux site (a) and Arconac site (b).

5 Discussion

Durant 2 ans et en raison de travaux importants sur l’usine de Sabart, l’hydrologie d’un tronçon court-circuité de 14,8 km du Vicdessos – grande rivière pyrénéenne à forts enjeux halieutique et touristique – a été profondément modifiée avec la mise en place d’un régime d’éclusée qualifié de sévère (Courret et al., 2021). Dès les premières analyses du projet, l’évitement par l’arrêt complet des éclusées des aménagements amont est apparu économiquement et énergétiquement impossible à envisager sur une aussi longue période. Ce type de modification de gestion aurait entraîné une désoptimisation énergétique des 3 centrales et une contrainte forte dans la gestion des réservoirs d’altitude qui contribuent au soutien d’étiage de la Garonne et de l’Ariège. Le déversement induit au niveau de ces grands barrages n’était pas envisageable pour des questions de sûreté. La perte totale de capacité de dérivation de l’aménagement de Sabart imposait inévitablement la mise en place d’un régime de débit modifié dans les tronçons court-circuités.

La démarche itérative mise en œuvre par EDF basée sur une évaluation de sensibilité environnementale et sociétale, une analyse de risques et des études de dimensionnement de mesures d’atténuation, l’ensemble conduit dans un processus de concertation et de co-construction avec les acteurs de la gestion des milieux aquatiques, a permis de garantir la fonctionnalité de la population de truite commune.

L’efficacité biologique des mesures d’atténuation prises dans le projet Sabart peut être interprétée sur la base de leur pertinence écologique vis-à-vis du cycle de vie de la truite, des modalités de dimensionnement et de mises en œuvre ainsi que des procédures de concertation, de co-élaboration et de gouvernance qui ont été déployées.

L’évaluation de la sensibilité environnementale a constitué une base essentielle pour identifier clairement les objectifs biologiques et contextualiser les résultats des suivis d’efficacité. Sur le Vicdessos, les fortes densités de truites sont liées aux caractéristiques altitudinales et hydromorphologiques (diversité des habitats, débit d’étiage de l’ordre de 15 à 18 % du module) (Baran et al., 1995a et 1995b). Comme dans la majorité des cours d’eau du massif Pyrénéen, la dynamique de la population dépend beaucoup du contexte hydrologique et plus particulièrement de l’hydrologie hivernale et printanière (Bret et al., 2016 : Tissot et al., 2016). Ce point est majeur. Il a conduit le groupe de travail à définir un objectif général qui se résumait à éviter de générer artificiellement de mauvaises conditions de reproduction et d’émergence des alevins susceptibles de se cumuler à celles, d’origine naturelles, apparues avant ou pendant les travaux. L’enchaînement en 2018 puis 2019 de 2 contextes hydrologiques contrastés (forts débits hivernaux en 2018 ayant conduit à une diminution très importante du recrutement et faible débit en 2019 très favorable à la survie des alevins) a constitué une parfaite illustration de la nécessaire mise en perspective des mesures d’atténuation dans le contexte naturel du cours d’eau. Une simple comparaison des densités entre les deux années illustrant les situations avant et pendant les travaux aurait conduit à considérer qu’avec 28 fois plus d’alevins en 2019, les travaux n’avaient pas eu d’impact. Or, en repositionnant les résultats dans le contexte hydrologique, les abondances d’alevins, bien que fortes en 2019 à la station de Niaux, n’en restent pas moins déficitaires de 48 % par rapport à ce qu’il aurait pu être observé.

Les bilans de suivis de mesures d’atténuation portant sur la gestion des débits en cours d’eau salmonicole ont déjà clairement montré la nécessité de contextualiser les résultats biologiques notamment vis-à-vis de l’hydrologie naturelle que ce soit pour les débits minimums des tronçons court-circuités (Sabaton et al., 2004) ou pour les éclusées (Barillier et al., 2021).

L’arrêt des éclusées pendant trois semaines en période de reproduction a permis de maintenir une forte activité de ponte (51,5 nids/100 m en moyenne pour les 2 années contre 37,5 nids/100 m avant les travaux). Les variations infra-journalières de débit perturbent l’activité de reproduction des salmonidés en limitant l’accès à certains habitats granulométriquement favorable par des vitesses de courant trop élevées (Hunter, 1992). La construction d’une frayère peut prendre plusieurs heures (Jones et Ball, 1954) et dans un contexte d’éclusée, les poissons soumis à des variations de débit peuvent stopper leur activité de reproduction (Hatten et al., 2009 : Haas et al., 2016). La stabilité des débits observée pendant les 21 jours d’arrêt des éclusées a nettement favorisé l’activité de ponte des truites (79 % de l’activité dans cette période). Le compromis entre les enjeux biologiques et les contraintes économiques et énergétiques qui a participé à fixer cette durée s’est donc avéré efficace. En effet, sur le Vicdessos, les suivis ont montré que l’activité de reproduction se déroulait sur une période de 45 à 50 jours soit des valeurs très proches de celles observées sur d’autre cours d’eau de montagne (36 à 46 jours dans les Alpes (Riedl et Peter, 2013) ; 47 jours en Ecosse (Youngson et al., 2011)). Pour autant, une mesure d’atténuation ne portant que sur 45 % du temps de la période d’activité a garanti la fonctionnalité de cette phase du cycle biologique. Ce type de mesure ne semble pas avoir été souvent mis en œuvre (Cornu, 2015 : Moreira et al., 2018). La définition d’un débit de base et d’une amplitude assurant le maintien en eau des frayères constituent des mesures d’atténuation bien plus fréquemment utilisées (Harnish et al., 2014).

L’étude in situ de la mobilité des graviers et petits galets constitutifs des frayères par transpondeurs avait permis de fixer la valeur maximale de débit des éclusées afin de garantir le maintien de la structure des nids. En cours d’eau de montagne, les débits d’éclusée peuvent induire une mobilité des substrats (Gostner et al., 2011) notamment les plages de graviers. Sur un tronçon de rivière assez proche de la morphologie du Vicdessos (la Noguera en Espagne (330 km2, 1 % de pente)), Vericat et al. (2020) observent une mobilité de petits galets marqués de diamètre médian de 9 cm soumis à des éclusées de l’ordre de 16 m3/s. Cette divergence de résultats avec notre situation peut être liée au protocole d’étude. Dans le cas du Vicdessos, les galets marqués ont été implantés sur les zones de frayères potentielles, alors que sur la Noguera, l’implantation a été réalisée sur des transects couvrant la totalité du lit du cours d’eau. Il semble, qu’au vu des incertitudes des modélisations du transport solide et de la variabilité des contextes, ce point doit être investigué dans les contextes à forts enjeux de reproduction des salmonidés.

L’augmentation du débit est un facteur important lors de l’émergence dans le processus de dispersion des alevins (Crisp et Hurley, 1991a et 1991b). Chaque hausse de débit en modifiant les conditions hydrauliques oblige les alevins à dériver et coloniser de nouveaux habitats. Ce processus entraîne des pertes qui seront d‘autant plus importantes que le phénomène se répètera de nombreuses fois au printemps (Saltveit et al., 1995). En effet, les très jeunes alevins de truites possèdent des capacités de nage très limitées (Heggenes et Traaen, 1988, Liebig et al., 2001). Juste après l’émergence, ils utilisent préférentiellement les habitats proches des berges et à faible vitesse (Gaudin, 2001). Dans les régimes d’éclusées, la répétition de valeurs élevées de débits induisant de fortes vitesses d’écoulement en période de post-émergence des alevins de truite peut affecter leur survie en générant des processus de dérive forcée (Valentin et al., 1995 : Liebig et al., 1998 : Lechner et al., 2016). Ces processus peuvent conduire à de forts impacts sur les abondances d’alevins (Liebig et al., 1999 : Saltveit et al., 2020). La limitation du débit maximal des éclusées et surtout la réduction importante du nombre d’évènements a permis, sur le Vicdessos, de limiter ces phénomènes de dérive forcée et d’assurer une survie printanière satisfaisante pour les alevins. La mise en œuvre de gradients de hausse ou de paliers ainsi qu’une limitation des débits maximums d’éclusées sont des mesures d’atténuation souvent mises en œuvre ou préconisées (Cornu, 2015). Les effets des réductions de gradients ou l’instauration de paliers sur la dérive forcée des alevins apparaissent peu significatifs (Parasiewicz et al., 1998 : Zeiringer et al., 2014). La réduction du nombre de variations n’a été que très peu mise en œuvre et donc peu étudiée en termes d’efficacité biologique. Dans le Vicdessos, le fonctionnement normal des usines amont aurait conduit à observer en moyenne 75 éclusées pendant la période où la mesure de réduction hebdomadaire a été mise en œuvre (36–37 jours), soit une valeur très supérieure à la situation lors des travaux (29 éclusées en 2019 et aucune en 2020). Ainsi, comme pour la reproduction, il semble que ce soit la limitation du nombre d’éclusées qui ait eu l’effet le plus significatif sur la population de truite. Pour autant, il n’est pas possible, sur la base de ce retour d’expérience, d’indiquer un nombre maximal d’éclusées acceptable pendant cette période d’émergence.

Au-delà des critères biologiques ayant servi à la définition des mesures pour la reproduction et l’émergence, ce sont les suivis biologiques très fins (observations quantitatives bi-hebdomadaires de l’activité de reproduction) et la connaissance en direct de la température de l’eau qui ont permis d’établir des prévisions d’activité et de construire un dispositif de vigilance partagé aboutissant à des prises de décisions anticipées. Ce pilotage basé sur des observations de terrain est indispensable lorsqu’il s’agit d’adapter des mesures au cycle biologique d’une espèce (Karr et Chu, 1997). Pour autant, peu d’exemples sont disponibles à l’exception de la rivière Dordogne dont la gestion hydrologique s’appuie en partie sur des observations en temps réel sur le terrain (Cazeneuve et al., 2020).

La mise en place d’une concertation avec les acteurs de la gestion des milieux aquatiques a joué un rôle essentiel vis-à-vis de l’efficacité des mesures. La définition et le partage des enjeux ont constitué le socle de la construction d’une relation de confiance entre les intervenants indispensable à ce type de projet. Une fois les enjeux définis et partagés, il s’est agi de renforcer cette confiance en initiant une collaboration technique basée sur les savoirs de chacun pour définir une méthodologie précise de travail tout en listant les contraintes et en les arbitrant. Le travail a ainsi évolué du statut de concertation, à la co-construction et à la gouvernance partagée. Les travaux ont donc été projeté non pas uniquement vis-à-vis du fonctionnement d’un écosystème aquatique mais au sein d’un socio-écosystème intégrant les enjeux d’usages (Lagadeuc et Chenorkian, 2009). Une dynamique collaborative basée à la fois sur l’expertise et les connaissances des acteurs locaux est un moyen pertinent pour une meilleure intégration des contraintes environnementales dans un projet d’aménagement (Virapongse et al., 2016).

La substitution des approches de quantification « classique » des impacts par l’analyse de risques a facilité le dialogue entre les intervenants. Cette méthodologie apparaît plus neutre et plus ouverte. La réalisation d’un chantier est le lieu d’un partage de signification et de sens entre des acteurs d’origine et de culture différentes à la fois en interne EDF mais également lors des étapes de concertation avec les parties prenantes. Un des avantages de l’analyse de risques est de partager collégialement sur les perceptions du risque et de proposer des parades qui sont le résultat d’une approche multicritère en confrontant les points de vue, l’ensemble animé par la recherche d’un compromis. L’atout majeur d’une analyse de risques est donc de définir un cadre de communication commun entre tous les acteurs et de limiter les approches dogmatiques en partageant collégialement l’efficience des parades.

L’intégration des volets économiques et énergétiques a également été importante. Elle doit être réalisée le plus en amont possible notamment quand il s’agit, comme durant la période de reproduction de la truite, d’une indisponibilité de 4 aménagements participant à la production d’énergie de pointe. Plus l’indisponibilité est anticipée et programmée et moins elle est pénalisante pour la production énergétique.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier les membres du groupe technique, Mme Marie-Chalotte Bousquet, Déléguée territoriale EDF vallée de l’Ariège, MM. Francis Gayou et Philippe Bobel de l’Office Français pour la Biodiversité, M. François Jean de la Direction Départementale des Territoires de l’Ariège, M. Jean-Pierre Jenn de l’Association ANPER-TOS « Le Chabot » et M. Christophe Alidières, Chef du groupement d’usines EDF d’Auzat ainsi que Mme Agnès Barillier pour la relecture attentive du manuscrit et M. Jean-Philippe Latcher pour sa très forte implication dans les observations biologiques de terrain.

Références

  • Baglinière J.L. & Maisse G., 2002. La biologie de la truite commune (Salmo trutta L.) dans la rivière Scorff, Bretagne : une synthèse des études de 1972 à 1997. INRA Productions Animales 15(5): 319–331. [Google Scholar]
  • Baran P., Delacoste M., Poizat G. & Lascaux J.M., 1995a. Approche multi-échelles des relations entre les caractéristiques d’habitat et les populations de truite commune (Salmo trutta L.) dans les Pyrénées centrales. Bull. Fr. Pêche Pisci. 337-339: 399–406. [Google Scholar]
  • Baran P., Delacoste M., Dauba F., Lascaux J.M., & Belaud A., 1995b. Effects of reduced flow on brown trout populations downstream dams in French Pyrenees. Regul. Rivers: Res. Mgmt. 10: 347–361. [Google Scholar]
  • Baran P., 2018. Caractérisation des risques écomorphologiques associés au fonctionnement par éclusée des masses d’eau des bassins Rhône-Méditerranée et Corse − Synthèse. Rapport ECOGEA E170723 pour AERMC, 63 p. [Google Scholar]
  • Baran P. & Ville F., 2018. Caractérisation des risques écomorphologiques associés au fonctionnement par éclusée des masses d’eau des bassins Rhône-Méditerranée et Corse − Mission 3 : Diagnostic des risques écomorphologiques associés au fonctionnement par éclusée. Rapport ECOGEA E170723 pour AERMC, 77 p et annexes. [Google Scholar]
  • Barillier A., Bèche L., Malavoi J.R. & Gouraud V., 2021. Identification of effective hydropeaking mitigation measures: Are hydraulic habitat models sufficient in a global approach? J. Ecohydraulics 2–14. [Google Scholar]
  • Baumann P. & Klaus I., 2003. Conséquences écologiques des éclusées. Étude bibliographique. Information concernant la pêche n°76, OFEFP, 116 p. [Google Scholar]
  • Bejarano M.D., Sordo-Ward A., Alonso C. & Nilsson C., 2017. Characterizing effects of hydropower plants on sub-daily flow regimes. J. Hydrol. 550: 186–200. [Google Scholar]
  • Bravard J.P. & Gilvera J., 1993. Structure hydro-géomorphologique des hydrosystèmes. In : Hydrosystèmes fluviaux (C. Amoros, G.E. Petts, Eds.), pp. 83–103. Paris: Masson. [Google Scholar]
  • Bret V., Bergerot B., Capra H., Gouraud V. & Lamouroux N., 2016. Influence of discharge, hydraulics, water temperature, and dispersal on density synchrony in brown trout populations (Salmo trutta). Can. J. Fish. Aquat. Sci. 73(3): 319–329. [Google Scholar]
  • Brothier C., 2014. Étude hydrologique usine de Sabart. Rapport interne EDF-DTG. H-44200968-2014-002389-A, 10 p. [Google Scholar]
  • Bruslé J. & Quignard J.P., 2001. Biologie des Poissons d’Eau douce européens, 2001. Paris: Éditions Tec & Doc, Lavoisier, 625 p. [Google Scholar]
  • Capra H., Breil P. & Souchon Y., 1995a. A new tool to interpret magnitude and duration of fish habitat variations. Regul. Rivers: Res. Mgmt. 10(2-4): 281–289. [Google Scholar]
  • Capra, H., Valentin S., & Breil P., 1995b. Chroniques d’habitat et dynamique de populations de truite. Bull. Fr. Pêche Pisci. (337-339): 337–344. [Google Scholar]
  • Carle F.L. & Strub M.R., 1978. A new method for estimating population size from removal data. Biometrics 34: 621–630. [CrossRef] [Google Scholar]
  • Casas-Mulet R., Saltveit S.J. & Alfredsen K., 2014. The Survival of Atlantic Salmon (Salmo salar) Eggs During Dewatering in a River Subjected to Hydropeaking. River Res Appl. 31(4): 433–446. [Google Scholar]
  • Cazeneuve L., Kardacz J. & Lascaux J.M., 2020. Vieille écologique de l’impacts des éclusées sur le bassin de la Dordogne. Synthèse des observations réalisées sur la Dordogne, la Maronne et la Cère en 2020. Rapport ECOGEA pour EPIDOR, 45 p et annexes. [Google Scholar]
  • CETMEF, 2001. Évaluation écotoxicologique de sédiments contaminés ou de matériaux de dragage. Direction de la Recherche et des Affaires Scientifiques et Techniques du Ministère de l’Equipement des Transports et du Logement et par Voies navigables de France. Centre d’Études Techniques Maritimes et Fluviales, 12 p. [Google Scholar]
  • Cornu V., 2015. Mesures de réduction de l’impact des éclusées sur l’écosystème en aval. Synthèse bibliographique des travaux menés à l’étranger. Rapport EDF/AFB, 68 p. [Google Scholar]
  • Crisp D.T. & Hurley M.A., 1991a. Stream channel experiments on downstream movements of recently emerged trout, (Salmo trutta L.) and salmon, (Salmo salar L). I. Effect of four different water velocity treatments upon dispersal rate. J. Fish Biol. 39: 347–361. [Google Scholar]
  • Crisp D.T., & Hurley M.A., 1991b. Stream channel experiments on downstream movements of recently emerged trout, Salmo trutta L. and salmon, S. salar L. 11. Effect of constant and changing velocities and of day and night upon dispersal rate. J. Fish Biol. 39: 363–370. [Google Scholar]
  • Courret D., Baran P. & Larinier M., 2021. An indicator to characterize hydrological alteration due to hydropeaking. J. Ecohydraulics, https://doi.org/10.1080/24705357.2020.1871307. [Google Scholar]
  • Delacoste M., Baran P., Lek S. & Lascaux J.M., 1995. Classification et clé de détermination des faciès d’écoulement en rivières de montagne. Bull. Fr. Pêche Pisci. 337-339: 149–156. [Google Scholar]
  • Delacoste M., Baran P., Dauba F. & Belaud A., 1993. Étude du macrohabitat de reproduction de la truite commune (Salmo trutta L.) dans une rivière pyrénéenne, La Neste du Louron. Évaluation d’un potentiel de l’habitat physique de reproduction. Bull. Fr. Pêche Pisci. 331(331): 341–356. [Google Scholar]
  • Delacoste M., 1995. Analyse de la variabilité spatiale de la reproduction de la truite commune (Salmo trutta L.) : étude à l’échelle du micro et du macrohabitat dans 6 rivières des Pyrénées centrales. Thèse de doctorat : Sciences agronomiques. Toulouse: INPT. [Google Scholar]
  • Delacoste M., Baran P. & Lascaux J.M. 2000. A methodology to evaluate physical habitat for reproduction of brown trout (Salmo trutta L.) and the relation with fry recruitment. In:Management and Ecology of River Fisheries (I.G. Cowx, Ed.), pp. 158–174. [Google Scholar]
  • Delacoste M., & Laribaut G., 2002. Élaboration d’une grille d’évaluation des abondances de truites pour les cours d’eau des Hautes-Pyrénées. Rapport FDAAPPMA 65, 58 p. [Google Scholar]
  • De Lury D.B., 1951. On the planning of experiments for estimation of fish populations. J. Fish. Res. Bd. Can. 18(4): 281–307. [Google Scholar]
  • ECOGEA, 2017. Modélisation hydraulique du Vicdessos pour la définition des mesures correctrices du régime d’éclusée. Travaux dans le cadre de l’arrêt de l’usine de Sabart. Rapport ECOGEA pour EDF-CIH, 35 p. [Google Scholar]
  • Elliot J.M., 1994. Quantitative ecology and the brown trout. Oxford, New-York, Tokyo: Oxford University Press (Ed.), 286 p. [Google Scholar]
  • Erné-Heintz V., 2018. Croiser les regards pour renouveler l’analyse du risque. Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande 50(2): 345–354. [Google Scholar]
  • Gaudin P., 2001. Habitat shifts in juvenile riverine fish. Archiv für Hydrobiologie Suppl. 135(2-4): 393–408. [Google Scholar]
  • Gostner W., Lucarelli C., Theiner D., Kager A., Premstaller G. & Schleiss J. 2011. A holistic approach to reduce negative impacts of hydropeaking. In : Dams and Reservoirs under Changing Challenges (A. Schleiss, R. Boes, Eds.), pp. 857–865. [Google Scholar]
  • Greimel F., Schülting L., Graf W., Bondar-Kunze E., Auer S., Zeiringer B. & Haue C., 2018. Hydropeaking Impacts and Mitigation. In : Riverine Ecosystem Management Aquatic Ecology (S. Schmutz, J. Sendzimir, Eds.), pp. 91–110. [Google Scholar]
  • Halleraker J.H., Alfredsen K., Arnekleiv J.V., Fjeldstad H.P., Harby A. & Saltveit S.J., 1999.Environmental impacts of hydropeaking − with emphasis on River Nidelva in Trondheim, Norway. Optimum use of run-of-river hydropower schemes. Trondheim, 7 p. [Google Scholar]
  • Halleraker J.H., Salveit S.J., Harby A., Arnekleiv J.V., Fjeldstad H.P. & Kohler B., 2003. Factors influencing stranding of wild juvenile brown trout (Salmo trutta) during rapid and frequent flow decreases in an artificial stream. River Res Appl. 19: 589–603. [Google Scholar]
  • Harnish R.A., Sharma R., McMichael G.A., Langshaw R.B. & Pearson T.N., 2014. Effect of hydroelectric dam operations on the freshwater productivity of a Columbia River fall Chinook salmon population. Can. J. Fish. Aquat. Sci. 71: 602–615. [Google Scholar]
  • Haas C., Zinke P., Vollset K.W., Sauterleute J., Skoglund H., 2016. Behaviour of spawning Atlantic salmon and brown trout during ramping events. J. Appl. Water Eng. Res. 4(1): 25–30. [Google Scholar]
  • Hatten J.R., Tiffan K.F., Anglin D.R., Haeseker S.L., Skalicky J.J. & Schaller H., 2009. A spatial model to assess the effects of hydropower operations on Columbia River fall Chinook salmon spawning habitat. N. Am. J. Fish. Manag. 29(5): 1379–1405. [Google Scholar]
  • Heggenes J. & Traaen T., 1988. Downstream migration and critical water velocities in stream channels for fry of four salmonid species. J. Fish Biol. 32(5): 717–727. [Google Scholar]
  • Hunter M.A. 1992. Hydropower flow fluctuations and salmonids: A review of the biological effects, mechanical causes and options for mitigation. State of Washington: Department of Fisheries, Technical Report No. 119. [Google Scholar]
  • Jones J.W. & Ball J.N., 1954. The spawning behaviour of brown trout and salmon. Anim. Behav. 2(3): 103–114. [Google Scholar]
  • Karr J.R. & Chu E.W., 1997. Biological monitoring: Essential foundation for ecological risk assessment. Hum. Ecol. Risk Assess. 3(6): 993–1004. [Google Scholar]
  • King H.R. & Pankhurst N.W., 2000. Ovulation of Tasmanian Atlantic salmon maintained at elevated temperatures: implications of climate change for sustainable industry development. In : Proceedings of the 6th International Symposium on the Reproductive Physiology of Fish (B. Norberg, O.S. Kjesbu, G.L. Taranger, E. Andersson & S.O. Stefansson, Eds.), pp. 396–398. Bergen: John Grieg A/S. [Google Scholar]
  • Lagadeuc Y. & Chenorkian R., 2009. Les systèmes socio-écologiques : vers une approche spatiale et temporelle. Nat. Sci. Soc. 17(2): 194–96. [Google Scholar]
  • Lechner A., Keckeis H. & Humpries P., 2016. Patterns and processes in the drift of early developmental stages of fish in rivers: A review. Rev. Fish Biol. Fisheries 26(3): 471–489. [Google Scholar]
  • Liebig H., Lim P. & Belaud A., 1998. Influence du débit de base et de la durée des éclusées sur la dérive d’alevins de truite commune : expérimentations en canal semi-naturel. Bull. Fr. Pêche Piscic. 350-351: 337–347. [Google Scholar]
  • Liebig H., Céréghino R., Lim P., Belaud A. & Lek S., 1999. Impact of hydropeaking on the abundance of juvenile brown trout in a Pyrenean stream. Archiv. für Hydrobiology 144(4): 439–454. [Google Scholar]
  • Liebig H., Mastrorillo S., Gaudin P. & Lim P. 2001. Microhabitat use by brown trout (Salmo trutta L.) in a mountain stream affected by peaking-power hydroelectric operations (Pyrénées, Southeast France). Archiv. für Hydrobiology Suppl. 135(2-4): 203–218. [Google Scholar]
  • Maltby L., 2006. Environmental risk assessment. In : Chemicals in the environment: Assessing and managing risk (Issues in Environmental Science C & Technology) (R.E. Hester, R.M. Harrison, Eds.). Royal Society of Chemistry, pp. 84–101. [Google Scholar]
  • Moreira M., Hayes D.S., Boavida I., Schletterer M., Schmutz S. & Pinheiro, A., 2018. Ecologically-based criteria for hydropeaking mitigation: A review. Sci. Total Environ. 657: 1508–1522. [Google Scholar]
  • Parasiewicz P., Schmutz S. & Moog O., 1998. The effect of managed hydropower peaking on the physical habitat, benthos and fish fauna in the Bregenzerach in Austria. Fish. Manag. Ecol. 5: 403–417. [Google Scholar]
  • Perrodin Y., Babut M., Bedell J.P., Bray M., Clément B., Delolme C., Devaux A., Durrieu C., Garric J., & Montuelle B., 2006. Assessment of ecotoxicological risks related to depositing dredged materials from canals in northern France on soil. Environ. Int. 32: 804–814. [Google Scholar]
  • Perrodin Y., Boillot C., Angerville R., Donguy G. & Emmanuel E., 2011. Ecological risk assessment of urban and industrial systems: A review. Sci. Total Environ. 409: 5162–5176. [Google Scholar]
  • Riedl C. & Peter, A., 2013. Timing of brown trout spawning in Alpine rivers with special consideration of egg burial depth. Ecol. Freshw. Fish 22(3): 384–397. [Google Scholar]
  • Sabaton C., et al. 2004. The “Guaranteed Flow Working Group”: A French evaluation of microhabitat component of IFIM based on habitat and brown trout population monitoring. Hydroécologie Appliquée 14(1): 245–270. [Google Scholar]
  • Saltveit S.J., Bremnes T. & Linda O.R., 1995. Effect of sudden increase in discharge in a large river on newly emerged Atlantic salmon (Salmo salar) and brown trout (Salmo trutta) fry. Ecol. Freshw. Fish 4(4): 168–174. [Google Scholar]
  • Saltveit S.J., Brabrand Å., Juárez A., Stickler M. & Dønnum B.O., 2020. The impact of hydropeaking on juvenile brown trout (Salmo trutta) in a Norwegian regulated river. Sustainability 12(20): 8670. [Google Scholar]
  • Schmutz S., et al. 2015. Response of fish communities to hydrological and morphological alterations in hydropeaking rivers of Austria. River Res. Appl. 31(4): 919–930. [Google Scholar]
  • Tissot L., Bret V., Capra H., Baran P. & Gouraud V., 2016. Main potential drivers of trout population dynamics in bypassed stream sections. Ecol. Freshw. Fish 26(3): 336–346. [Google Scholar]
  • Valette L., Piffady J., Chandesris A. & Souchon Y., 2012. SYRAH-CE : description des données et modélisation du risque d’altération de l’hydromorphologie des cours d’eau pour l’État des lieux DCE. Pôle Hydroécologie des cours d’eau Onema-Irstea Lyon, MALY-LHQ, 104 p. [Google Scholar]
  • Valentin S., 1995. Variabilité artificielle des conditions d’habitat et conséquences sur les peuplements aquatiques : effets écologiques des éclusées hydroélectriques en rivière. Thèse de Doctorat. Université de Lyon. [Google Scholar]
  • Valentin S., Souchon Y. & Wasson J.G., 1995. Evaluation of hydropeaking effects on fish community and habitat. In : Rehabilitation of Freshwater Fisheries (I.G. Cowx, Ed.), pp. 138–151. Oxford: Fishing News Books, Blackwell Scientific Publications. [Google Scholar]
  • Vericat D., Ville F., Palau-Ibars A. & Batalla. R., 2020. Effects of hydropeaking on bed mobility: Evidence from a Pyrenean river. Waters 12(178): 2–23. [Google Scholar]
  • Virapongse A., et al., 2016. A social-ecological systems approach for environmental management. J. Environ. Manag. 178: 83–91. [Google Scholar]
  • Yotte A. & Garmendia L., 2011. État des lieux hydromorphologiques du Vicdessos dans le TCC de Sabart. Rapport FDAAPPMA Ariège pour EDF, 27 p. [Google Scholar]
  • Young P., Cech J., Jr., & Thompson L., 2011. Hydropower-related pulsed-flow impacts on stream fishes: A brief review, conceptual model, knowledge gaps, and research needs. Rev. Fish Biol. Fish. 21(4): 713–731. [Google Scholar]
  • Youngson A.F., Piertney S.B., Thorley J.L., Malcolm I.A. & Soulsby C., 2011. Spatial association of nest construction by brown trout Salmo trutta. J. Fish Biol. 78(3): 713–725. [Google Scholar]
  • Zeiringer B., Fohler N., Auer S., Greimel F. & Schmutz S., 2014. Experiments on drifting and stranding of juvenile grayling during fluctuating flow in nature-like channels with different morphological structures. Trondheim (Norway): 10th International Symposium on Ecohydraulics, pp. 23–27. [Google Scholar]

Liste des tableaux

Tableau 1

Caractéristiques des stations d’étude des débits.

Characteristics of study sites using for study of hydrology.

Tableau 2

Caractéristiques des stations de suivi piscicole.

Characteristics of study sites of the fish monitoring.

Tableau 3

Sites sélectionnés pour l’analyse des risques écomorphologiques.

Study sites selected for the analysis of ecomorphological risks.

Tableau 4

Limites des classes de vulnérabilité écomorphologiques (SGF : surface granulométriquement favorable à la reproduction ; IGHS : Indice Global d’Habitat Sensible).

Limits of ecomorphological vulnerability classes.

Tableau 5

Tableau de contingence pour l’évaluation du niveau de risque écomorphologique.

Contingency table for the assessment of the level of ecomorphological environmental hazard.

Tableau 6

Surface granulométriquement favorable à la reproduction aux 10 stations d’étude de l’habitat et de l’activité de reproduction au cours de l’étape 1.

Area of gravel suitable for spawning of the 10 study sites of spawning habitat and activity for the step 1.

Tableau 7

Occurrence des différentes espèces de poissons capturés aux deux stations d’étude.

Occurrence of the different fish species caught at the two study sites.

Tableau 8

Densité numérique et pondérale des différentes espèces de poissons capturés aux deux stations d’étude.

Numerical and weight density of the different fish species caught at the two study sites.

Tableau 9

Densités de frayères aux 10 stations d’étude de l’activité de reproduction lors de l’état initial de 2015.

Redd densities at the 10 study sites of spawning activity during the initial state at 2015.

Tableau 10

Résultats de l’analyse des vulnérabilités.

Results of vulnerability analysis.

Tableau 11

Résultats de l’analyse des risques.

Results of risk analysis.

Tableau 12

Mesures d’atténuation mise en œuvre par phase du cycle biologique de la truite.

Mitigation measures implemented during the different life-stages of trout.

Tableau 13

Critères de déclaration des états de vigilance basés sur le nombre cumulé de degrés-jours nécessaires pour l’émergence des larves chez la truite commune (Baglinière et Maisse, 2002 : Elliot, 1994 : Bruslé et Quignard, 2001).

Criteria for declaring states of vigilance based on the cumulative number of degree-days required for larvae to emerge in brown trout (Baglinière and Maisse, 2002 : Elliot, 1994 : Bruslé and Quignard, 2001).

Tableau 14

Comparaisons des caractéristiques du régime hydrologique avant et pendant les travaux.

Comparison of the characteristics of flow regime before and during the work period.

Tableau 15

Nombre d’éclusées et valeur de l’indicateur durant les différentes périodes de travaux.

Number of hydropeaking and value of indicator during the different period of works.

Tableau 16

Nombre de nids de truites comptabilisés sur le Vicdessos pendant et en dehors des périodes d’arrêt des turbinages des usines amont travaux.

Number of redds of trout counted during and outside the shutdowns of the upstream hydropower plants.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Situation géographique du tronçon court-circuité de Sabart avec positionnement de la station hydrométrique, des stations d’étude des zones de frayères et de l’analyse de risques.

Geographical situation of by-pass section of Sabart with positioning gauging station and study sites of spawning habitat and risk analysis.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Situation géographique du tronçon court-circuité de Sabart avec positionnement de la station hydrométrique, des stations d’étude de la mobilité du substrat et des poissons.

Geographical situation of by-pass section of Sabart with positioning gauging station and study sites of the mobility of substrate and fish communities.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Débits moyens mensuels naturels et observés du Vicdessos à la station hydrométrique de la banque HYDRO (station o1144620). 

Natural and observed mean monthly flows of Vicdessos at the gauging station in the by-pass section at Vicdessos (station o1144620).

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Comparaison des débits médians de l’hydrologie de base aux différentes périodes du cycle biologique de la truite avec le débit maximal potentiel des éclusées à la station hydrométrique de Vicdessos et à Niaux.

Comparison between median flows of the basic hydrology for the different life-stage of brown trout with the maximum potential flow of hydropeaking at the gauging station of Vicdessos and Niaux station.

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Relation entre la densité d’alevins à la station de Niaux entre 1995 et 2006 et le débit maximal journalier des 3 stations hydrométriques les plus proches pendant la période d’incubation et d’émergence.

Relationship between the density of trout fry and the daily maximum flow of the 3 near gauging stations during the incubation of eggs and the emergence of fry.

Dans le texte
thumbnail Fig. 6

Analyse en composante principale des variables hydrologiques des stations hydrométriques du haut bassin de l’Ariège influençant les phases du cycle biologique de la truite. Les deux 1ers axes expliquent 95 % de la variance.

Principal composant analysis of hydrological variables of the gauging stations of high Ariège basin influencing the phases of the biological cycle of trout. The first two axe accounted for 95% of variance.

Dans le texte
thumbnail Fig. 7

Évolution du nombre cumulé de frayères comptabilisée sur les 10 stations d’étude en 2017 et des débits moyens journaliers à la station hydrométrique de Vicdessos.

Evolution of the cumulative number of redds recorded at the 10 study sites in 2017 and the average daily flows at the Vicdessos gauging station.

Dans le texte
thumbnail Fig. 8

Relation entre les surfaces granulométriquement favorable à la reproduction mises en eau (SGF), les surfaces hydrauliquement favorables (SGFSPU) et le débit aux 3 stations étudiées dans l’analyse de risque.

Relationship between area of gravel suitable for spawning (SGF) and weighted usable area (SGFSPU) and value of flow at the 3 study sites of risk analysis.

Dans le texte
thumbnail Fig. 9

Relation entre les surfaces d’habitat favorable aux alevins post-émergents de truite et le débit aux 3 stations étudiées dans l’analyse de risque.

Relationship between weighted usable area for post-emergent trout fry and value of flow at the 3 study sites of risk analysis.

Dans le texte
thumbnail Fig. 10

Évolution des degrés-jours depuis le début de la ponte et le 1er quartile de l’activité de reproduction avec projection des différents niveaux de vigilance.

Evolution of degree-days since the first laying and 1st quartile of spawning activity with projection of the different levels of vigilance.

Dans le texte
thumbnail Fig. 11

Comparaison des débits moyens journaliers pendant la période de travaux avec les débits médians, quinquennaux secs et humides du tronçon court-circuité.

Comparison of mean daily flow during the work period and the median, five-year dry and wet flow of the by-section section.

Dans le texte
thumbnail Fig. 12

Évolution du nombre de nids cumulés sur les 6 stations d’étude du TCC de Sabart et du débit à pas de temps variable à la station hydrométrique de Vicdessos.

Evolution of the cumulative number of redds in the 6 study sites of the by-pass section of the Vicdessos and Variable and short time-step flow at the Vicdessos gauging station.

Dans le texte
thumbnail Fig. 13

Classes d’abondance annuelle des alevins de truite calculées sur 20 stations du haut bassin de l’Ariège (a) et sur les 2 stations d’étude du Vicdessos (b) de 2016 à 2020.

Annual abundance class of trout fry calculated for 20 sites of the high Ariège basin (a) and the 2 study sites of Vicdessos (b) from 2016 to 2020.

Dans le texte
thumbnail Fig. 14

Densités des différentes classes d’âge de truites pour les 4 années de suivi sur la station de Niaux (SP2) (a) et d’Arconac (SP1) (b).

Densities of different age-class of trout for the 4 years of monitoring at the Niaux site (a) and Arconac site (b).

Dans le texte

Current usage metrics show cumulative count of Article Views (full-text article views including HTML views, PDF and ePub downloads, according to the available data) and Abstracts Views on Vision4Press platform.

Data correspond to usage on the plateform after 2015. The current usage metrics is available 48-96 hours after online publication and is updated daily on week days.

Initial download of the metrics may take a while.